Parcours d'infos - 22 décembre 2020
C'est qui ?
L’équipe du projet Compagnon Maladies Rares
Emilie Boisset, Compagnon Maladies Rares
Depuis 2018, avec le soutien de l’Agence régionale de santé Nouvelle-Aquitaine, l’Alliance maladies rares met en œuvre dans cette région le projet Compagnon Maladies Rares. Cette expérimentation propose un accompagnement à l’autonomie des personnes concernées par les maladies rares, accompagnement mené par des travailleurs pairs qu’on appelle les Compagnons Maladies Rares. Rencontre avec l’un de ces Compagnons, Emilie Boisset.
Maladies Rares Info Services : Pour commencer, pouvez-vous nous dire quelques mots sur vous ?
Emilie Boisset : J’ai 33 ans et depuis septembre 2018 je suis l’une des sept Compagnons Maladies Rares. Nous sommes six personnes concernées directement par la maladie et un aidant proche d’un enfant atteint d’une maladie rare. Je m’occupe plus spécifiquement du territoire de la Gironde, de la Charente et de la Charente-Maritime et j’ai déjà accompagné une dizaine de personnes. Auparavant je travaillais dans le domaine de l’insertion professionnelle, et j’étais aussi bénévole active pour une association dans le champ de la santé.
Maladies Rares Info Services : Quels sont les principaux objectifs et les principales caractéristiques du projet Compagnon Maladies Rares ?
Emilie Boisset : Cette expérimentation est une réponse à un appel à projet national initié par le Ministère de la santé. Son objet est de tester un accompagnement à l’autonomie en santé dans les maladies rares par des travailleurs pairs, c’est-à-dire des travailleurs eux-mêmes concernés par la maladie. Le but est de renforcer la capacité des personnes accompagnées à prendre des décisions par elles-mêmes et à agir.
Il s’agit aussi d’un accompagnement de proximité : les sept Compagnons se répartissent les territoires de la Nouvelle-Aquitaine en fonction de leur localisation afin d’être au plus près des personnes accompagnées et des ressources locales vers lesquelles ils peuvent les orienter.
Cette expérimentation se termine fin 2021. L’objectif est qu’au terme de l’évaluation dont elle sera l’objet, elle soit dupliquée sur l’ensemble du territoire national. Depuis le début de la mise en œuvre effective du projet, en mars 2019, nous avons répondu à 72 sollicitations, accompagné 29 personnes et informé ou orienté 22 personnes.
Maladies Rares Info Services : Qui sont les personnes accompagnées ?
Emilie Boisset : Il s’agit souvent de personnes, avec ou sans diagnostic, qui sont arrivées au bout de ce qu’elles pouvaient chercher toutes seules, qui ne savent pas quelle information est la bonne, qui sont dans des situations pour lesquelles il n’existe que très peu d’information ou qui ont besoin d’informations de proximité au plus proche de leur territoire. Mais il n’y a pas de profil type : nous accompagnons aussi bien des adultes concernés par la maladie que des parents d’enfants malades, des personnes d’âges et de catégories socioprofessionnelles très variés.
Maladies Rares Info Services : En quoi consiste concrètement l’accompagnement ?
Emilie Boisset : La première prise de contact est souvent une demande d’information, d’orientation et d’écoute. Lorsque la relation de confiance est établie, la demande peut évoluer vers une demande d’accompagnement. L’objectif est que cela soit la personne elle-même qui identifie et formule son besoin d’accompagnement, afin qu’elle soit actrice de ses décisions et de son parcours.
L’accompagnement concerne souvent les droits sociaux, les démarches : construire un dossier de demande auprès de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), obtenir une reconnaissance d’affection de longue durée (ALD) auprès de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM), un accompagnement dans l’insertion professionnelle ou dans la scolarisation. Nous menons ces accompagnements avec un réseau local de partenaires qui peuvent être amenés à intervenir ou à prendre le relais (assistantes sociales, psychologues, plateformes territoriales d’appui, équipes relais handicaps rares, …).
La durée de l’accompagnement est très variable selon le type de demande et suivant si la demande initiale débouche sur d’autres demandes ou non, mais, et c’est important, il n’y a pas de limite de durée (sous réserve de reconduite au terme de l’expérimentation). En outre il s’agit d’un accompagnement totalement gratuit.
Maladies Rares Info Services : Quels sont les « plus » de cet accompagnement par les pairs ?
Emilie Boisset : La compréhension des difficultés traversées est essentielle pour les personnes accompagnées. Elles ont souvent connu beaucoup d’errance, nous sommes parfois les premières personnes à les écouter sans les juger et à les croire.
Le regard que nous portons sur elles, un regard d’humain à humain plutôt que de professionnel à personne malade, est aussi extrêmement bénéfique pour les personnes que nous accompagnons. Il y a également un effet miroir assez positif : face à nous les personnes accompagnées se disent « si vous, vous y arrivez, je peux aussi » (par exemple à reprendre une activité professionnelle).
Notre accompagnement se caractérise aussi par la place centrale qu’y occupent les personnes accompagnées : elles expriment leurs besoins et leurs attentes avec leurs priorités, là où un modèle plus classique d’accompagnement fonctionnerait avec une évaluation et des orientations plus codifiées. L’écoute et le soutien sont centraux dans notre pratique, pour permettre aux personnes d’être en confiance et de verbaliser leurs besoins et leurs attentes. Le soutien consiste beaucoup en de la réassurance : les personnes ont souvent les ressources pour faire face mais elles ont besoin d’être rassurées sur le fait qu’elles les ont.
Maladies Rares Info Services : les Compagnons Maladies Rares sont-ils formés à ce travail d’accompagnement ?
Emilie Boisset : Bien sûr. Nous avons tout d’abord bénéficié d’une formation socle de 6 mois, portant tant sur la connaissance des maladies rares et ses acteurs que sur le médico-social, l’éducation thérapeutique du patient, l’écoute, la psychologie, etc. Nous continuons de nous former régulièrement en fonction des attentes et des besoins.
Maladies Rares Info Services : Pour vous, qu’est-ce que cela signifie être Compagnon Maladies Rares ?
Emilie Boisset : Pour moi être Compagnon Maladies Rares c’est être une personne qui accompagne une autre personne, à son rythme et sur le chemin qu’elle a choisi. C’est porteur de plein d’espoir sur notre place dans la société car d’une faiblesse nous avons pu faire faire une force, nous avons été recrutés justement car nous sommes concernés par la maladie, considérée comme une plus-value et comme un point de départ pour développer des compétences. C’est aussi une expérience très riche faite de rencontres avec des personnes extraordinaires (les personnes accompagnées mais aussi des médecins, des acteurs associatifs, …).
Maladies Rares Info Services : quelle complémentarité y a-t-il avec le service national d’information qu’est Maladies Rares Info Services ?
Emilie Boisset : Un grand nombre des personnes que nous accompagnons a été orienté vers nous par Maladies Rares Info Services en vue de bénéficier d’un accompagnement de proximité, notamment dans des cas concernant des maladies très rares pour lesquelles très peu d’informations sont disponibles et pour lesquelles il n’existe pas d’association. Et nous contactons nous-même régulièrement Maladies Rares Info Services pour obtenir des informations ou des validations d’informations.
Maladies Rares Info Services : Comment peut-on contacter un Compagnon Maladies Rares ?
Emilie Boisset : Pour solliciter les Compagnons Maladies Rares il faut vivre en Nouvelle-Aquitaine. Initialement nous ne couvrions pas l’ensemble de cette région compte tenu de nos localisations respectives. Néanmoins le développement du travail à distance dans le cadre de l’épidémie de COVID-19 nous a amenés à évoluer sur cette question et nous accompagnons désormais des personnes sur l’ensemble de la Nouvelle-Aquitaine. Plus d’informations sur quand et comment contacter les Compagnons Maladies Rares sont disponibles sur notre site ou sur notre page Facebook.