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Parcours d'infos - 30 septembre 2020

C'est qui ?

Laurence Olivier-Faivre

Professeur Laurence Olivier-Faivre, coordonnateur général de la filière AnDDI-Rares

Face à la pandémie de COVID-19, la Filière de Santé Anomalies du Développement avec ou sans Déficience Intellectuelle de causes Rares - AnDDI-Rares a été très réactive pour accompagner au mieux les patients durant cette période. Le Pr Laurence Olivier-Faivre (PU-PH centre de génétique du CHU de Dijon) et coordonnateur général de la filière AnDDI-Rares nous détaille les mesures prises.

Maladies Rares Info Services : Quelles mesures ont été mises en place par la filière AnDDI-Rares pour la prise en charge des patients lors de l’annonce du confinement ? 

Pr Laurence Faivre : Nous avons dû nous mobiliser et nous organiser en un temps extrêmement court de façon complétement différente. Toute notre activité a été centrée sur le suivi et l’information des personnes malades. Les téléconsultations en visioconférence ont pu être mises en place par les agences régionales de santé et les CHU très rapidement. Nous travaillions déjà depuis plus d’un an à cette mise en place et l’épidémie a donné un gigantesque coup d’accélérateur au processus. Les femmes ayant une grossesse avec malformations fœtales ont continué à bénéficier d’un suivi en présentiel. Pour les autres personnes, les consultations étaient soit assurées par visioconférence ou par téléphone, soit reportées. Par ailleurs, des écoutes téléphoniques par les psychologues de nos centres de références et de compétences ont été proposées avec des numéros dédiés.

Maladies Rares Info Services : De quelle manière avez-vous informé les personnes malades et les professionnels de santé de la filière ? 

Pr Laurence Faivre : Nous avons réalisé des newsletters dont la première a été envoyée dès le 1er avril. Puis à un rythme d’une toutes les deux semaines, cinq au total. Ces newsletters ont été envoyées aux professionnels de santé et à une centaine d’associations qui relayaient aux personnes malades. Si des informations importantes devaient être communiquées dans l’intervalle, elles étaient diffusées directement par mails, soit aux filières de soins, soit aux associations. 

Dans ces newsletters, il y avait des documents spécifiquement conçus pour les personnes prises en charge par la filière. Par exemple, des informations sur les solutions d’écoute téléphonique ou encore cette fiche « Patient fragile COVID-19 » que nous avons réalisée très rapidement à la demande des associations pour les personnes qui ne pourraient pas expliquer leur situation si elles devaient se rendre seules aux urgences et/ou être hospitalisées. Ce document a été mis à disposition des familles qui pouvaient le remplir en cas de besoin et le transmettre au personnel soignant des hôpitaux. Dans la troisième newsletter, nous avons transmis par exemple les recommandations éditées pour les personnes porteuses de trisomie 21 ainsi qu’une fiche pour les personnes atteintes du syndrome de Williams dont l’anxiété était susceptible d’être majorée par le confinement. 

Nous avons aussi relayé et recensé de nombreux documents sur le COVID-19 produits par d’autres organismes ou filières de santé maladies rares, que ce soit des foires aux questions, des ressources pour expliquer le confinement ou les gestes barrières aux enfants ou aux personnes handicapées, des procédures d’aide ou encore les recommandations provenant du site du gouvernement, de différents hôpitaux ou associations, et également des initiatives de recherche. Il y a eu une grande quantité d’informations communiquée pendant cette période. Nous nous sommes même demandé s’il n’y en avait pas trop avec trop de redondance et si cela n’allait pas être contreproductif, à terme, en créant, en quelque sorte, un « chaos numérique ». 

Des visioconférences avec des spécialistes ont aussi été organisées à la demande par la filière pour répondre à des questions particulières de personnes malades ou d’associations.

Maladies Rares Info Services : Et pour les professionnels de santé ? 

Pr Laurence Faivre : Pour les professionnels de santé, une Web émission « COVID-19 et grossesse » à l’initiative de la société savante de foetopathologie (SOFFOET), qui s’est déroulée le 27 mars, a notamment eu beaucoup de succès.

Au niveau de la recherche, le réseau européen de référence dont fait partie la filière AnDDI-Rares a mis en place une base de données pour recenser les cas de personnes avec anomalies du développement et hospitalisées pour le COVID-19. Un projet visant à rechercher des facteurs de prédisposition génétique aux formes graves du COVID-19 a également été lancé et la filière a pu relayer cette information. Une étude internationale a aussi été réalisée pour comprendre la réaction (peur, appréhension, anxiété, etc.) et les stratégies d’adaptation à l’épidémie de COVID-19 de parents d’enfants (enfants et adultes) ayant des besoins spéciaux. L’implication de la France dans cette étude a été quelque peu décevante et on peut se demander si cela n’est pas lié en partie à ces enquêtes trop nombreuses. 

Enfin, une bibliographie « Covid, pédiatrie et anomalies du développement » a été proposée dans nos deux dernières newsletters.

Maladies Rares Info Services : Comment avez-vous préparé le déconfinement ?

Pr Laurence Faivre : Sur sollicitation du Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP), un groupe de travail multidisciplinaire a été constitué en urgence en un week-end pour se pencher sur la problématique du déconfinement ou du maintien à domicile des personnes en situation de handicap. Un document a été remis au HCSP qui a été pris en compte dans sa synthèse générale. Le seul fait d’être atteint d’une maladie génétique ou congénitale responsable d’anomalies du développement et/ou de syndrome polymalformatif n’était pas une contre-indication au déconfinement. Il a d’ailleurs été souligné les risques d’une prolongation du confinement tant sur le plan psychologique que pour le dépistage des pathologies et/ou pour leur prise en charge au quotidien (notamment la prise en charge paramédicale des personnes en situation de handicap). Mais lorsque le handicap ne permettait pas le respect des gestes barrières, des mesures d’accompagnement des personnes et de protections pour les professionnels et l’entourage étaient nécessaires. Des numéros de téléphone et adresses mails dédiés ont été mis en place pour donner des avis sur des cas particuliers. De nombreux éléments devaient parfois être pris en compte avant de décider de la conduite à tenir : pathologie et comorbidités, situation familiale, impact du confinement, crainte de la famille du déconfinement, …

Maladies Rares Info Services : Comment s’est passée la reprise ? 

Pr Laurence Faivre : Les retards et les délais de consultations ont été relativement limités car l’activité s’est poursuivie pendant le confinement et toute une catégorie de personnes ont préféré attendre avant de consulter à nouveau. Les téléconsultations ont été poursuivies jusqu’à normalisation de la situation. Certaines habitudes ont été conservées, comme par exemple rendre les résultats par téléconsultation hors annonce sensible. Nos infirmières ont eu beaucoup de travail pour rattraper le retard pris, notamment concernant les prélèvements qui s’étaient accumulés. Nous sommes maintenant revenus à notre fonctionnement habituel.

Maladies Rares Info Services : Quel premier bilan peut-on tirer de ce fonctionnement hors norme ?  

Pr Laurence Faivre : Un bilan globalement positif pour la filière de soins. Tout le monde s’est concentré sur la crise et fortement investi. Les directions ont été particulièrement réactives et nous avons pu mettre en place, tous ensemble, des solutions avec une rapidité inédite ! Les consultations par téléphone ou en visio conférence nous ont permis de poursuivre notre activité dans de bonnes conditions. Notre mode de fonctionnement se prête bien en effet à ce type de consultations car nous avons beaucoup d’explications à délivrer aux personnes que nous suivons, qui parfois viennent de très loin. Ce type de fonctionnement est plus compliqué quand il y a nécessité de réaliser des examens complémentaires : prélèvements biologiques, imagerie.

Maladies Rares Info Services : Etes-vous prêts pour une éventuelle deuxième vague ?

Pr Laurence Faivre : Oui nous sommes prêts d’autant plus qu’un reconfinement généralisé paraît être un scénario actuellement exclu.

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